Voilà c'est fait. On a vu le père Noël et il a été gentil avec nous. Enfin il a essayé, peut pas non plus tout résoudre seul.
J'ai fait mes cadeaux et puis il y a ceux que j'ai eu envie d'offrir, même si je sentais bien qu'ils étaient hors de portée. Mais invétéré optimiste, j'ai pensé qu'il n'y a pas de mur qu'on ne puisse abattre.
C'est que je me suis trompé d'outil. J'ai pris dans ma besace un vieux livre de conte en lequel il y avait un vieux faitout cabossé. Il avait servi de chaudron chaleureux pour l'édification de quelques vieilles recettes oubliées.
Il me semblait un peu gros pour mes talents mais je me suis lancé. Avant tout, j'ai commencé par une toilette perso. Me fallait me sentir un peu nu pour cette décoction à venir, et en même temps je l'étais déjà un peu, par certains côtés.
Alors d'abord, j'ai frotté dur pour me décrasser l'orgueil. J'avais sûrement un peu négligé cette saleté silencieuse et inodore, et du coup je me suis un peu échauffé pour m'en défaire mais bon an mal an, j'ai fini par me sentir un peu décrotté. Après, j'ai du dépoussiérer ma mémoire sélective. J'ai du poncer fort pour faire disparaître une croûte épaisse de rancoeur. Assez pour m'apercevoir qu'il était temps de laisser le coeur de certaine chose simplement Être. Je dois pour être honnête aussi ne pas taire que le côté déjà un peu nu dont j'ai fait mention m'y a poussé aussi, impécunieux à venir, contraint par un vilain juge trop surchargé de travail pour lire autrement qu'en biais les histoires à deux sources dont il est abreuvé.
Ainsi dégrossi de mes énergies peu enviables, j'ai jeté dans le chaudron quelques essences essentielles. Il y avait surtout l'amour (celui qu'on donne en plein à ses enfants) et le pardon (celui qu'on doit à celle ou celui qui a permis d'en donner à plein) puis une brassée d'épices plus ou moins corsées. Il y avait la raison, la responsabilité, la conscience, l'honnêteté, l'humanisme. C'est vrai qu'on les utilise à toutes les sauces et qu'on peut parfois en perdre le goût primaire, mais là, bon je les avais bien isolées et elles étaient prêtes pour ma recette.
J'ai raté ma recette, sûrement. A moins que le palais auquel j'ai tenté de la faire goûter soit irrémédiablement corrodé ou qu'il m'ait manqué les ingrédients qui apaisent, après trop de repas fielleux mal pimentés de vénalité cupide et de "colèrhaine" stériles.
Je le regrette profondément pour ce qu'à cette table vont encore et toujours déjeuner ceux qui sont la prunelle de tous ceux qui ont procréé, sans que même pour de saines raisons, quand le temps vient de le faire, il soit possible d'y faire asseoir en même temps deux parents séparés.
Mais aussi, ont goûté ma recette deux de mes prunelles, avec envie, et m'a été remis un petit livre par ma fille, inquiète de ce que son père Noël ait pu se tromper lorsqu'elle lui a demandé ce qui me ferait plaisir. A lire ce petit opus par ses soins déniché, subversif mais pas agressif, j'y ai trouvé le profond réconfort que les doux naïfs ont raison, même quand les aveugles les cabossent avec la plus triste abnégation futile. Je cite:
"je l'ai haï pour avoir pris ce qui ne peut que se donner, je l'ai détesté pour son avidité présomptueuse et abîmée, tout en aimant ce fait que sa honte pourrait être supérieure à ma capacité de pardon."
L'espoir fait vivre, après tout, le 25 décembre prochain, c'est Noël....
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